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Les TD d'Histoire des Institutions
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6 avril 2009

Les liens d'homme à homme (II)

Deux procédures mérovingiennes créaient des liens de dépendance entre des hommes libres : l’obnoxiatio et la commendatio.

 

L’obnoxiatio

Il s’agissait de la soumission volontaire et spontanée de la personne et des biens d’un ingénu (homme libre) au service d’un maître, qu’il soit religieux ou laïc ; soumission qui entraînait la perte de la condition d’homme libre. Cette procédure, par ailleurs mal connue car nous sommes très peu renseigné à son sujet, n’engendrait pas d’obligations de services d’ordre militaire, mais attachait le demandeur à une terre. Dans une société où l’élément monétaire est très réduit, c’était un moyen d’effectuer une donation à un établissement ecclésiastique tout en faisant acte de pénitence, avec l’espérance de gagner le paradis. C’était encore une façon de rembourser ses dettes et de « revendre » sa créance à un plus puisant qui se « remboursera » à long terme par le travail et les revenus de la terre du soumis. L’obnoxiatio était constatée par un acte écrit (carta) et par une procédure symbolique manifestant le changement d’état du protégé. A la différence des hommes libres qui pressés par la misère, vendaient leur liberté pour une somme d'argent et se retrouvaient en état de servitude définitive, le titulaire d’une obnoxiatio avait théoriquement la faculté de se racheter en remboursant son prix de vente rehaussé d’une certaine proportion. Cependant, dans les faits, la procédure d’obnoxiatio désignera indifféremment tout abandon volontaire qu’il soit temporaire ou définitif, du statut d’ingénu. La plus ancienne source écrite décrivant une procédure d’obnoxiatio date du VIIè siècle.

 

Le leudesamio

Le leudesamio est la prestation individuelle d’un serment de fidélité qu’un homme libre, c’est-à-dire un guerrier armé portait au souverain (Il est lui-même issu du serment d’allégeance -leudesamium avec lequel il va être confondu- prêté à l’empereur romain par les légionnaires). Ce serment concrétise un lien personnel, unilatéral et sans contrepartie qui unit le Roi franc (et plus tard l’empereur carolingien) avec son sujet. Il n’y est pas question de contrat synallagmatique ou d’obligations contractuelles. L'homme libre ayant prononcé le leudesanium est appelé leute ou leude (« fidèle guerrier »).

 

Le commendatio

De véritables contrats apparaissent aux termes desquels les futurs protégés (commendatus ou vassus) se recommandaient à leur protecteur par le biais de la commendatio. Le protecteur, le seigneur (senior, signor, dominus…) est toujours un homme libre, tout comme le recommandé qui doit pouvoir disposer librement de sa personne pour se placer sous le mundium (puissance) et la mainbour (protection) d’un puissant, tout en restant libre. Le commendatio est un contrat synallagmatique, personnel et viager qui engendre des obligations bilatérales prenant fin à la mort d’un des partenaires. De la part du recommandé, il implique soumission et respect (obsequium) au maître, ainsi qu’assistance, en particulier dans le domaine militaire (servicium). De son coté, le seigneur doit d’abord l’assistance et la protection à celui qui s’est recommandé. L’entretien vient ensuite : il admet éventuellement son vassus à sa table et lui offre un chasement, et/ou participe à l’entretien de son équipement militaire. Une compensation était prévue en cas de violation de l’une des parties. Il n’y est pas encore question d’hommage et de beneficium : ces concepts n’apparaîtront pas avant le VIIIè siècle. L’idée dominante est d’assurer la sécurité du recommandé et la puissance du seigneur. Face à un pouvoir faible, voire incapable de garantir la sécurité des individus, les réseaux de dépendance se multiplient.

 

Lorsque qu’un élément de nature foncière viendra renforcer une fidélité et des obligations réciproques entre deux hommes libres, et que ce processus prendra un caractère coutumier, la féodalité pourra se mettre naturellement en place, forte de ces précédents historiques.

 

Sources : notes personnelles du cours d’histoire politique médiévale de M. GIULIATO Gérard, maître de conférences en histoire médiévale à l’Université de Nancy2, notes personnelles du cours d’histoire économique et sociale du Moyen Age de Mme SCHNEIDER-OLLAND, maître de conférences en histoire médiévale à l’Université de Nancy2

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